Eric Costerousse, une passion dévorante qui ne faiblit pas.


 
Eric Costerousse est sapeur-pompier volontaire depuis 1986 lors de son entrée au centre de secours Caldagués. Il a Grimp(é) les barreaux de la grande l’échelle les uns après les autres. Il ne pensait sûrement pas à cette époque devenir IMP3* en mission régulièrement sur le Dragon 63. Sa situation actuelle procède d’une démarche sur une voie toute tracée qui relève de la passion pour ne pas dire dévotion matinée d’enthousiasme et, osons le mot, d’aventure. À la suite d’un accident qui a défrayé la chronique dans le microcosme Caldagués, la plupart de ses compatriotes ont appris qu’il participait ce jour-là à l’hélitreuillage du polytraumatisé . Il est descendu sur les lieux avec le médecin auprès de la victime et a dû sécuriser le blessé. La mission s’avérait délicate et engagée dans un environnement peu propice à cette conjoncture, devant de nombreux badauds massés aux alentours, appareil photo ou smartphone en action. Le Dragon s’est arraché, a hissé  Éric et le brancard. Il est remonté avec la civière accrochée à un filin de prés de 90 mètres pour sortir d’un milieu piégeux pour ce genre de processus. Il connaissait l’accidenté, chez lui les frissons le parcourent. Quelques jours plus tard, je m’approche de la Truyére emmitouflée dans une brume de fin d’été. J’ai rendez-vous avec Éric dans sa maison familiale. Neuf heures du matin, j’arrive quasiment comme lui. Il vient d’achever une permanence de 24 heures à Clermont-Ferrand. Les traits tirés, visiblement fatigué. Il se sert un café, m’en propose un, et se pose en face de moi sur la table de la salle à manger. Il apprécie le calme de la maison. Il va retrouver ses deux enfants Alice, Tom et Anna leur maman. Il retrace les grandes dates de son parcours jalonné d’apprentissages, enseignements et motivations. Il aime son métier malgré les risques encourus. Il accompagne toujours la victime dans la civière. La quittera seulement dans la salle des urgences une quarantaine de minutes plus tard. Au moment du déchocage, il enlèvera les liens qui retiennent le blessé dans sa coquille. Là, c’est autre part : médecins, chirurgiens, spécialistes, infirmières et autres blouses blanches s’occuperont du corps meurtri. Avec le jeune Caldagués, ils se sont parlé durant le trajet, le camping-car, la chute… son ange gardien, la chance, les circonstances… « Je n’aurais jamais pensé devoir intervenir chez nous pour quelqu’un que je connais. C’est autre chose qu’ailleurs où l’affectif ne nous rattache à rien même si… » Sa phrase reste en suspend. Il ignore son statut de héros pour les Caldagués, une fierté. Beaucoup de gens ont pu filmer le dispositif, Anna notamment. Il approche son I Phone et met en route la vidéo. On entend distinctement le petit Tom parler de son papa. Mais les risques ? « Tout est bordé il y a un pilote, un mécanicien-opérateur, un médecin-urgentiste, un infirmier et un pompier, moi en l’occurrence, dans l’appareil. » En ravin, il descend le premier et communique avec le frelon rouge et jaune. Il attend le praticien et donne tous renseignements utiles à l’équipage. Et la remontée ? « Tu sais, à partir de là tu ne maîtrises plus rien. Tu te balances parfois au bout de 80 mètres de câble avec quelqu’un dans la coquille. L’hélico s’arrache, en même temps le treuil enroule le filin. Tu ne regardes pas en bas de toute manière. Tu n’as pas le temps de penser à tout cela. Ça va souvent vite et je songe à la procédure au moment de rentrer “mon accidenté” à l’intérieur de la carlingue : les gestes, le courant d’air, le bruit des pales, les conversations dans le casque. Dans l’hélicoptère, nous sommes une équipe chacun avec ses soucis personnels, ses humeurs. À ce moment-là, tout s’aplatit. Nous sommes des professionnels, la victime d’abord, les protocoles, rentrer au plus vite. La moindre minute compte. Rester à disposition du médecin. Si le blessé vient à avoir envie de vomir, nous devons le tourner, manipuler… » Mais tout ceci suppose des heures de formation et simulation, d’entraînement, d’ingestion et digestion de textes et termes techniques. Il déroule, sur son téléphone, des pages de notes, documents, croquis comme celui de l’entrée de la civière dans l’habitacle. Il prépare, pour septembre, une manœuvre sur le viaduc de Garabit. Outre de travailler avec le Dragon, il intervient en milieu périlleux sur toutes sortes de situations du grimpeur en falaise à la voiture vautrée au milieu d’un ravin. À chaque contexte correspond, son matériel spécifique pour des conditions souvent extrêmement délicates. Tout cela s’apprend, s’entretient. Une heure plus tard, je le laisse à son repos. L’âge, le métier et l’expertise ont modelé le garçon : sensible, apaisé, apprécié, toujours passionné par ce métier au service des victimes et autres accidentés de la vie. Il demeure aussi pompier volontaire à la caserne de la station thermale où son expérience tient lieu d’assurance…

*IMP3 : Initiation certificative au Centre National de Formation de Florac (Lozère) d’une durée de 10 jours ; encadrement des opérations de sauvetage.

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