Les coiffes et les rubans de Jean-François Blanc
Il en existe pour accumuler les intégrales des cantates de Dietrich
Buxtehude ou des neuf symphonies de Beethoven au point d’en
posséder plusieurs dizaines différentes. J’ai trouvé à
l’occasion de la fête du folklore un homme qui lui collectionne
les coiffes et les rubans. « Je m’appelle Jean-François
Blanc je suis menuisier à Chanaleils. » Le garçon
installe, chaque année à l’occasion de la fête du folklore, un
stand dans la salle Beauredon où il met sous le regard des
spectateurs : parures, chemisiers et autres pièces
vestimentaires dont il détient un bel assortiment. « En
rangeant ses affaires ma grand-mère un jour m’a donné une
pèlerine je devais avoir cinq ou six ans, cela me plaisait, je
l’ai gardé et depuis ». Il s’attache à acheter, recevoir
toute garde-robe ancienne. « Dans le temps les paysans, les
femmes plus particulièrement endossaient les mêmes effets rien ne
les distinguaient hormis la coiffe qui d’un lieu à l’ailleurs,
d’une région, d’une vallée ou d’une ville pouvait indiquer
son origine.» Une charlotte de la planèze ne ressemblait pas à
celle de Saint-Flour sud, différente également de celle de
Saint-Flour Nord. Celles du Cantal ne s’apparentaient pas aux
Aveyronnaises. L’épouse portait à vie son couvre chef, dont la
confection variait. L’observateur savait les racines des filles.
Il possède aussi des jupes, des tabliers. « Les hommes
mettaient des blouses et le chapeau. Les tenues masculines se
ressemblaient terriblement. Les classes sociales les plus huppées se
singularisaient par le port de toilettes dites à la mode parisienne,
qui les identifiaient » . Des costumes d’époque
authentique, châles, pèlerines, rubans, bonnets tout en
récupération, chine ou achats. « j’ai de la chance
souvent on m’en donne. » L’habit ou la coiffe jouaient
un rôle distinctif, marquaient des différences, Salers ou la
planéze, le Caldagués ou Lozère. Les chapeaux d’Italie étaient
très répandus, la paille arrivait vraiment d’Italie, par les
colporteurs sans doute. Tout ceci donne un capital de prés de trois
cents pièces, il ne compte pas, mais repère exactement ce qui lui
manque si vous lui en subtilisez. « Je les connais tous en
détail, je sais d’où ils viennent voire à qui ils
appartenaient » outre de faire œuvre de collection il
verse dans l’anthropologie en observateur attentif et expert. Dans
une troupe folklorique, il vous dira immanquablement d’où les
femmes sont issues. Myriam sa compagne, possède une superbe robe
bleu marine à parements noirs. « Elle, je la lui ai
ajustée ». Pour les coiffes ou les chapeaux, il fabrique
les moules en bois. Ses préférences vont vers les authentiques,
c’est le patrimoine, le vrai. Le garçon, appliqué, sans
doute un tantinet maniaque détient un goût très sûr, la
présentation du stand le démontre, la qualité des objets trahit
sa méticulosité intrinsèque. Myriam demeure toute acquise à la
cause de son amoureux. Je vais vous dire un secret. Ils forment un
couple de danseurs émérites, si l’on peut employer ce
qualificatif pour la danse. Exceptionnel. À l’entracte nous nous
retrouverons pour la photographie avec Myriam. Et je pose la
question : quand vous vous marierez tu confectionneras la
robe? Un moment d’hésitation, Jean-François ne dit pas non.
Myriam lui rappelle, mais cela porte malheur si le futur voit la
robe avant… Le sourire de Myriam en disait long, trahissait sa
pensée... Jean-Francois, à toi de...