Annulation de la troisième édition du Festival de Tatouage ?
« Organisée
par les professionnels du monde du tatouage, la convention
permet de rassembler des tatoueurs
et un public d’amateurs au sein d’un même espace, le plus
souvent le temps d’un week-end. Elle permet non seulement aux
connaisseurs de se retrouver, mais aussi aux non-initiés de
découvrir l’art du tatouage et même, pourquoi pas, de sauter le
pas et de se faire tatouer
par un artiste de son choix. Les deux plus grandes conventions en
France sont le mondial du tatouage, qui se déroule à Paris au mois
de mars, et le Festival
de Chaudes-Aigues,
initié par Stéphane Chaudes-Aigues et qui a lieu dans ce village du
Cantal en juillet. »
C’est l’avis de la journaliste de l’Express qui a couvert les
deux précédentes éditions du festival de tatouage de
Chaudes-Aigues. Il se pourrait qu’il n’en reste désormais
qu’une. La rumeur bruissait ici ou là depuis quelques semaines.
Mais comme à chaque fois portée par les seules bonnes intentions de
quelques-uns. Et puis par un matin d’hiver de janvier, la nouvelle
se confirmait, devenait officielle. Il n’y aura pas de festival en
2015. L’annonce a gelé tous les enthousiasmes. Nous avons voulu en
savoir plus et la réalité n’est peut-être pas aussi abrupte.
Stéphane Chaudesaigues a accepté de nous en parler.
Des
difficultés logistiques
Les
deux premières éditions du Festival du Tatouage ont constitué un
succès phénoménal, malgré une situation géographique éloignée
des grandes métropoles. Mais « Problèmes
logistiques et normes de sécurité, partenariats et équilibre
budgétaire et autres facteurs m’ont poussé, à l’issue de
mois d’intense réflexion, à prendre cette pénible décision.
Reporter ou annuler le troisième
chapitre de l’histoire du festival. Nous sommes venus à manquer
cruellement d’espace sur le site d’exploitation. »
La
manifestation est victime de son succès. Le manque de place est
aujourd’hui un problème, tant pour l’accueil des visiteurs que
pour la multitude de tatoueurs qui souhaitent bénéficier d’un
stand. La solution ? Stéphane Chaudesaigues pensait l’avoir
trouvée, l’imaginait
pérenne,
en acquérant le bâtiment de l’ancienne école privée. « Nous
avions fait une proposition au propriétaire de l’école, qui
avait en premier lieu accepté notre offre. Le bâtiment a finalement
été vendu à un autre en dépit de notre surenchère ».
Une
priorité : la Sécurité.
« Aujourd’hui,
sans espace supplémentaire, la réalité est que nous ne pouvons
plus développer le Festival sans régresser qualitativement. Autre
facteur ayant parlé : la sécurité. Jusqu’à la deuxième
édition encore, tout allait bien. Mais pour une application
scrupuleuse des exigences, il nous faudrait agrandir le site de notre
convention pour accueillir chaque festivalier, tatoueuse et tatoueur.
Les normes sont ainsi faites et nous nous refusons toute entorse à
ces règles. 2013
et 2014 se sont déroulées sans aucun incident à déplorer, malgré
le fait que, bien trop souvent, tatoueurs et tatoués sont considérés
comme marginaux, voire population
à
risque.
Le tatouage concerne toutes les couches socioprofessionnelles,
nonobstant une altérité de façade, n’a pas eu à se justifier de
comportements irrespectueux, incivils ou violents.
Un
déficit de partenaires
La
spirale d’un cercle vicieux est en place : moins de surface,
moins de stands, moins de recettes oblige à nouer d’autres
associations. « La
surprenante et encourageante rapidité avec laquelle le projet a
grandi nous empêche aujourd’hui de continuer à gérer seuls
l’événement. L’édition 2015 dans l’état actuel nous
contraint à trouver plus de partenaires pour nous accompagner tout
du long de cette belle aventure. Nos uniques forces et moyens ne
suffisent plus, hélas, pour garantir 3 jours de plaisir et de
découverte sous le signe du tatouage : sans aide, nous voilà
voués à mettre en suspens ce troisième épisode.
Un
budget qui peine à s’équilibrer
L’axiome
« L’argent est le nerf de la guerre » est
aussi, ici, une réalité qui s’applique
pour le festival du tatouage. « Je
dois vous dire que le budget investi dans la deuxième édition n’a
pas encore été équilibré. Nous placions nombre de nos espoirs
dans ce troisième volet.
La
SACEM
nous réclame, pour les deux premières éditions, des sommes
d’argent conséquentes que nous n’avons pas. »
La
frilosité, pour cette nouvelle édition, de la municipalité de
Chaudes-Aigues ajoutée à la nécessité d’une restriction
budgétaire a amené : « Monsieur
Molines, le maire actuel, à nous demander de faire un effort pour
prendre tout ou partie des navettes à notre charge, ce qui nous est
malheureusement impossible. » Ces
navettes n’en demeurent pas moins complètement indispensables. Sur
deux millésimes, elles ont permis à 22.000 personnes de rejoindre
le village et de générer un chiffre d’affaires de plus de
1.200.000 € pour Chaudes-Aigues. Sans compter les retombées
médiatiques qui constituent une vitrine au retentissement
considérable, construisant une image positive du Caldaguès.
Délocaliser
l’événement ?
D’aucuns
sont persuadés que l’organisateur aurait succombé à l’appel de
certaines sirènes : « Nous
avons songé à poursuivre l’aventure du Festival tout simplement
en le délocalisant à Clermont-Ferrand par exemple. Mais le projet a
vu le jour à Chaudes-Aigues et pour Chaudes-Aigues. Ce serait
trahison que de le déménager. Cet événement, à nos yeux, ne peut
avoir lieu que dans ce petit village, mon village. » Et
d’ajouter « Pour
ce village, mon village, on a pu totaliser quelques 22.000
festivaliers pour les deux premières années, autant de curieux qui
auront découvert ou redécouvert le tatouage et Chaudes-Aigues. Une
prouesse dont nous ne sommes pas peu fiers. » Affirme
Stéphane Chaudesaigues avant de poursuivre en forme de satisfaction
du devoir accompli « L’impact
médiatique et économique de la manifestation pour le village, mon
village, je le répète, a été majeur. Aujourd’hui, chacun doit
donc prendre ses responsabilités face à la décision de laisser le
troisième festival inachevé, pour une durée encore indéterminée.
Pour en finir
Pour en finir
Il
concluait avec beaucoup d’amertume dans la voix
« Un très grand merci, aux bénévoles, à nos partenaires et
amis, ainsi qu’à notre famille, pour leur aide inestimable et leur
temps. Aux habitants de Chaudes-Aigues, aussi, qui ont cru en ce
projet, et à leur accueil mémorable. Et enfin, merci à ceux qui
ont donné la vie, par leur présence, à ce projet, cet événement,
cette réunion de famille : les festivaliers. »
Non sans ajouter, « Tout
peut être envisagé,
mais pour le moment nous devons faire face à un véritable problème
de fond. » Laissant
une éventualité se dessiner.
Propos recueillis par P.P.
Propos recueillis par P.P.