La (seule) solution pour éliminer les rats taupiers.

 



Rendez-vous à huit heures du matin au Mas de Pêtre sur la commune de Deux -Verges. Si le soleil pointe déjà quelques rayons, le vent rafraîchit considérablement l’air et la température ressentie frôle zéro. Gérard Delprat m’attend. Nous nous attablons dans la cuisine pour parler du sujet qui m’intéresse et dont il a bien voulu m’entretenir. J’ai appris qu’il détenait le don d’éliminer les rats taupiers. Son tableau de chasse en compte des milliers. Le Monsieur en dénombre ce matin-là pas loin de six mille à son actif. Tous ses collègues râlent après ce fléau qui détruit les prairies, ôte toute chance d’une fenaison potable, se morfondent. Dans le temps, la bromadiolone se montrait efficace, la solution de facilité. Ce jusqu’au moment où le monde s’est aperçu que la consommation répétée de rongeurs intoxiqués provoquait la mort de leurs prédateurs naturels. Défense de l’utiliser. Le paysan se trouve désarmé devant cette situation. Aucun pendant actif, légitime, n’existe à ce produit. Les muridés eux ne s’en inquiètent pas, ils parcourent les sous-sols avec beaucoup de prestance. Mais démunis, les agriculteurs ne peuvent que constater la prolifération de l’espèce et ses corollaires. Le nuisible se reproduit en quantité, il se nourrit par ailleurs de racines*. Ensuite il demeure quasi invisible hormis par les taupinières constituées avec la terre sortie des galeries creusées. C’est là que Gérard Delprat intervient. Il connaît ses adversaires, vous décrit par le menu leur manière d’agir et de penser. Il passe trois mois à écumer les prairies de la famille, environ 150 hectares du côté du Mas de Pêtre sur Deux-Verges et du Monteil sur la commune de Chaudes-Aigues. Toute la semaine, sauf le dimanche, je me repose. Il occupe le temps à installer des ratières. En huit heures il attrape en moyenne entre 50 et 70 mulots. D’autres ont essayé, mais cela ne marche pas avec eux. Tu comprends certains tendent 10 ou 15 fers le matin et reviennent seulement le soir les relever. Le rongeur est doué de raison quand un danger se présente à un endroit il rebrousse chemin. Lorsqu’on ouvre un tunnel et qu’on le referme, il vient voir et déclenche le fer. Si le piège reste là trop longtemps, aucun autre campagnol ne s’y hasardera. D’où l’intérêt de les relever rapidement. Le mulot est intelligent, curieux, mais ne communique pas avec ses congénères. Après la chaleur de la maison, nous traversons une pâture du Monteil. La démonstration n’en devient que plus concluante. Méticuleux, attentif, observateur il possède un œil exercé pour trouver la galerie entre deux tas de terre. Je suis habillé comme en hiver. Lui une simple veste de treillis, sans gants, pose ses pièges, arrange la motte, insensible à la température. Recouvre le tout sans grande protection. Nous découvrons cinq ou six tunnels. Vingt minutes plus tard, nous allons voir les premiers fers. Et ! Il y a déjà des bestioles aux belles dimensions. Il referme les passages, « escampille la taupinière », continue sa mission jusqu’à midi. Mais une question me taraude. Que deviennent les cadavres ? À une période je les laissais au bord de la route et les busards ne mettaient pas longtemps à les consommer en une demi-heure ils avaient tout emporté. Ce n’était pas très ragoûtant pour le promeneur. Maintenant, dans un endroit au milieu des rochers je vide mon seau le soir. Le lendemain matin il ne reste rien, les rapaces et les renards nettoient. Sinon je les enterre. Il fait œuvre de restaurant du cœur pour animaux. Une économie circulaire diraient quelques-uns d’un air entendu. Ainsi durant trois mois Gérard passe son temps dans une activité chronophage s’il en est. Si vous apercevez du côté du Puy de la tuile une prairie sans monticule de terre, c’est qu’elle appartient à la famille Delprat. Stakhanoviste, en septembre prochain, il reprendra son fessou, son râteau et ses fers dans son seau d’aliments et repartira à l’assaut des rats des champs. Tel Sisyphe avec son rocher. Je vous le dis, il nourrit une passion, connaît les mœurs de la gent trotte menu. Lui, à la retraite désormais, s’occupe intelligemment. C’est un travail pas fatigant en plus. Ajoute t - il, comme pour s’excuser. La remarque qui le blesse de la part de certains :   « Vous avez de la chance ! Chez vous vous n’avez pas de rats taupiers… » Et lui de maugréer « Ceux là ils ont qu’à y venir avec moi… » La suite se perd dans le vent. En deux heures de leçon de choses, j’en ai appris plus que de besoin. Je suis passé maître ès mulots. Ne riez pas !




*Le Campagnol terrestre, qui vit environ 2 ans, peut infester une zone. En effet, la femelle peut avoir jusqu’à six portées par an de quatre à cinq petits chacune, avec une gestation de trois semaines et une maturité d’adultes à quatre. On comprend que les pullulations peuvent causer des soucis, surtout en l’absence de prédateur.



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